Bannir les clichés : Les dangers des visuels stéréotypés

Les banques d’images débordent de photos de seniors aux cheveux parfaitement blancs, toujours en promenade sur la plage ou jouant à la pétanque. Résultat : une communication uniforme, déconnectée du réel. Selon une étude de Silver Valley (2022), 67 % des seniors ne se reconnaissent pas dans les images proposées par les acteurs de la Silver Économie. Ces représentations stéréotypées génèrent plusieurs écueils :

  • Effet miroir négatif : Les seniors ne s’identifient pas. Ils se sentent exclus, voire infantilisés, par ces mises en scène figées et irréalistes.
  • Manque d’authenticité : Les familles comme les résidents pressentent que la communication travestit la réalité, ce qui peut semer le doute sur la sincérité de votre message.
  • Diversité oubliée : Le spectre des seniors est large : âge, origine, style de vie, niveau d’autonomie. Ignorer cette diversité, c’est passer à côté de cibles précieuses et de messages sincères.

À faire : Privilégier des photos prises au sein de vos établissements, montrer des moments quotidiens, varier les profils et les situations. L’authenticité n’est pas une option, c’est une nécessité pour restaurer une image crédible.

Le ton juste : Éviter le piège de l’infantilisation

Parler « comme à des enfants » à des personnes ayant une longue expérience de vie est un non-sens. Pourtant, la tentation de simplifier à l’extrême, d’adopter un ton maternant ou condescendant, reste une erreur répandue dans le secteur.

  • Effacement de l’identité : L’infantilisation nie l’expertise des seniors, leur parcours, leurs envies. Elle crée une distance immédiate et installe une dynamique de méfiance.
  • Impact sur l’engagement : Selon une enquête menée par l’Observatoire du Bien Vieillir en 2021, 72 % des seniors interrogés affirment qu’un ton paternaliste dans la communication des marques les irrite et influence leur choix d’engagement, notamment dans le secteur médico-social.
  • Risque de désengagement des familles : Les proches y voient souvent un manque de professionnalisme ou de respect, une raison suffisante pour regarder ailleurs.

À faire : S’adresser aux seniors comme à des adultes à part entière, en valorisant leur expérience et leurs choix. Utiliser un langage inclusif, direct et respectueux.

Clarté avant tout : Les dangers d’un jargon trop technique

Chaque secteur a ses termes spécifiques mais, dans le médico-social, le recours excessif au jargon ou aux acronymes est un frein sérieux à la compréhension.

  • Exclusion involontaire : Beaucoup de seniors (et leurs familles) ne sont pas familiers avec des expressions comme « GIR 2 », « PUI », ou « plan d’accompagnement personnalisé ». Cela peut leur donner l’impression d’être tenus à l’écart de décisions qui les concernent.
  • Perception d’opacité : L’univers des EHPAD et des solutions de services à domicile est déjà complexe. Un langage technique renforce le sentiment d’incompréhension et d’inquiétude, pointé par la CNSA dans un rapport de 2022.
  • Décision retardée : Face au flou, les familles reculent ou repoussent leur décision, alors que la clarté rassure et accélère l’engagement.

À faire : Expliquer systématiquement chaque terme spécifique, bannir les acronymes non explicités, privilégier le récit concret et le témoignage au lexique administratif ou médical.

Jouer franc jeu : Pourquoi la transparence est capitale

La défiance vis-à-vis des institutions est forte, notamment dans le secteur du grand âge. Toute ambiguïté dans votre communication sera perçue et sanctionnée, surtout depuis les scandales récents ayant touché certains groupes d’EHPAD (Le Monde, février 2022).

  • Confiance à restaurer : Selon le Baromètre Qualité de Vie et Bien-Vieillir 2023 de l’IFOP, 83 % des familles attendent une information exhaustive et honnête avant de choisir un établissement pour un proche.
  • Risque d’effondrement de la réputation : Une fausse note, une absence de réponse à une question sensible, et c’est l’ensemble de votre dispositif qui s’effondre. Les bad buzz sur les réseaux sociaux et les avis Google sont aujourd’hui des amplificateurs puissants.
  • Meilleure attractivité : Ce sont les établissements qui abordent la question du coût, des limites de leur offre, des difficultés réelles qui inspirent le plus confiance.

À faire : Communiquer de façon complète sur vos prestations, vos tarifs, vos équipes, les difficultés potentielles, et les démarches pour y répondre. N’occultez jamais une information sensible.

Le design au service de la lisibilité… ou de l’exclusion

Design trop « trendy », polices minuscules, contrastes insuffisants… Les erreurs de conception graphique nuisent gravement à la lisibilité pour les seniors. 40 % des plus de 75 ans souffrent de troubles visuels (INSEE, 2021).

  • Effort excessif demandé : Polices trop petites ou italique illisible rendent la lecture pénible, et entraînent un abandon rapide du support.
  • Non respect des normes d’accessibilité : Trop de supports oublient de respecter le RGAA (Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité), pourtant obligatoire pour les administrations publiques et recommandé pour tout le secteur médico-social.
  • Incompréhension de l’information : Un mauvais choix de couleurs, un usage excessif d’icônes « modernes » mais obscures, complexifient le message au lieu de le clarifier.

Conseils actionnables :

  • Choisir des polices lisibles et de taille suffisante (minimum 14 pts pour du print, 16 px pour du web)
  • Maximiser le contraste (texte noir sur fond blanc, éviter le gris clair)
  • Structurer le contenu avec des titres, intertitres et listes à puces
  • Inclure des alternatives textuelles pour toutes les images

Attention aux maladresses linguistiques : Le respect, dans chaque mot

Le diable se cache dans les détails. Certaines expressions, même banales, peuvent heurter ou véhiculer de mauvais messages :

  • Le terme « nos petits vieux », encore entendu dans certains médias ou supports
  • Parler du « placement » en EHPAD, terme connoté, au lieu d’accueil ou d’admission
  • Employer le « on » à la place du « vous » (ex : « On va vous aider à… »)
  • Sur-utilisation du passif, qui donne l’impression que la personne ne décide pas : « Vous serez accompagné » vs « Vous choisissez d’être accompagné »

Des maladresses qui semblent anodines, mais qui, répétées, traduisent un manque de considération et d’écoute. Il est prouvé que le choix des mots impacte le moral, l’implication et la confiance des seniors (source : Observatoire B2V des Mémoires, 2019).

Règle de base : Valoriser l’autonomie, utiliser un vocabulaire positif et orienté vers la personne, toujours privilégier l’échange direct.

Des messages sincères : Le piège des promesses creuses auprès des familles

Dans le contexte émotionnel du choix d’une solution pour un parent âgé, les familles sont hypersensibles aux promesses trop alléchantes.

  • Perte de crédibilité immédiate : Promettre « un nouveau chez-soi parfait » ou « zéro dépendance » est contre-productif dès qu’on rencontre la réalité du terrain.
  • Risque de contentieux : En cas de litige, ces promesses publicitaires peuvent vous être opposées, voire décrédibiliser l’ensemble de votre communication.
  • Attentes irréalistes : Les familles, déjà sous pression, s’attendent à un accompagnement personnalisé. Des engagements vagues frustrent et génèrent des déceptions… qui se traduisent dans les avis en ligne (60 % des familles consultent des avis avant de prendre une décision, selon KPMG, 2022).

À privilégier : L’honnêteté sur la vie quotidienne, le respect des limites, la mise en avant de valeurs et de retours concrets sur votre approche.

Organiser clairement ses informations : Les méfaits d’une mauvaise hiérarchisation

Une brochure ou un site mal organisés perdent instantanément leur public. Les problématiques de hiérarchisation dans la présentation de l’information touchent 1 senior sur 3 selon l’ANAP (2020), et les chiffres montent à 2 sur 3 pour les proches aidants.

  • Lecture sélective : Les seniors lisent rarement tout : ils cherchent le prix, les modalités d’accueil, ou le planning d’activités. Si cette donnée n’est pas accessible facilement, ils zappent.
  • Perte d’informations essentielles : Les messages importants (prise en charge médicale, sécurité, équipe) doivent être placés dans des emplacements stratégiques, sinon ils passent inaperçus.
  • Augmentation de la charge cognitive : Trop d’informations au même plan demandent un effort important, qui décourage l’engagement.

À appliquer :

  • Mettre en avant les informations principales dès le début
  • Soigner l’arborescence des sites web et l’ordre des rubriques dans les impressions papier
  • Utiliser des encadrés, des titres clairs, des FAQ pour simplifier la navigation

Un secteur en mouvement, une communication à repenser

Communiquer auprès des seniors ne s’improvise pas : chaque maladresse compte, chaque approximation est ressentie. Parmi les meilleures pratiques à retenir : authenticité visuelle, ton adulte, simplicité des mots, design accessible, transparence totale et promesses honnêtes. Le secteur du bien-vieillir évolue vite, et ceux qui relèvent ces défis avec exigence et sincérité seront les mieux placés pour attirer, fédérer et donner confiance à ce public exigeant, ainsi qu’à leurs proches.

La formation continue des équipes, le test des supports auprès du public concerné et la consultation régulière des familles sont des leviers puissants pour adapter et affiner une communication réellement efficace. Aller au-delà des évidences et oser revoir ses méthodes, c’est la clé d’un message porteur de sens et d’avenir.

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