Comprendre les différences d’attentes et de besoins

Lorsque l’on parle de communication dans le secteur du bien-vieillir, il est essentiel de sortir du discours uniforme. À public senior différent, stratégie différente – surtout lorsqu’on distingue des résidents autonomes de ceux en situation de dépendance. Selon la DREES, en 2023, 66% des résidents en EHPAD présentent une dépendance modérée à forte, tandis que la majorité des résidents en résidences services seniors conservent une autonomie significative (source DREES). Cette donnée façonne en profondeur la manière d’adresser messages et supports.

Difficile pour un établissement ou une marque du secteur senior de laisser une image professionnelle et humaine sans s’adapter réellement à l’état de santé, au degré de compréhension, à l’autonomie de ses destinataires. Ignorer cette différenciation, c’est risquer le hors-sujet, voire heurter ou infantiliser.

Réalités des profils : qui sont les résidents autonomes, qui sont les dépendants ?

Avant de repenser vos messages, connaître les profils :

  • Résidents autonomes : ils vivent en résidences services, à domicile ou parfois en EHPAD, mais avec GIR 5 ou 6 (Groupes Iso-Ressources). Ils gèrent leur quotidien, se déplacent, participent aux sorties, lisent la presse, s’informent sur internet.
  • Résidents dépendants : leur autonomie est réduite (GIR 1 à 4). Activités limitées, aides multiples, parfois troubles cognitifs (un résident sur deux en EHPAD d’après la Fondation Médéric Alzheimer), difficultés à s’exprimer, à lire ou à comprendre des consignes complexes.

Deux publics. Deux manières d’écouter, de réagir, d’adhérer à une information.

Canaux, formats et points de contact : ajuster sans standardiser

La question du “comment” se pose : on ne s’adresse pas à un résident autonome comme à une personne dépendante. Le choix des canaux, des supports et du rythme des messages est fondamental.

Les canaux qui fonctionnent pour les résidents autonomes

  • Supports imprimés développés : brochure, magazine, panneaux d’affichage, flyer. Capacité de lecture, envie de s’informer, goût pour la presse papier.
  • Emailing et réseaux sociaux : la littérature montre que 51 % des seniors de 65 à 75 ans utilisent internet quotidiennement (INSEE, 2023). Certains suivent la page Facebook de la résidence, d’autres apprécient la newsletter mensuelle.
  • Rencontres et événements : ateliers, conférences, réunions d’information où chacun s’exprime et pose des questions.

Les canaux adaptés aux résidents dépendants

  • Affichages grands formats et codes couleurs : repérage visuel facilité, simplicité des contenus, pictogrammes.
  • Supports audio et vidéos courts : capsules vidéo explicatives, annonces via haut-parleurs pour l’essentiel (élémentaires, pas de surinformation).
  • Communication orale accompagnée : transmission par l’équipe soignante ou les proches, relais par la famille.

Adapter le langage et le fond du message

Parler vrai, parler utile : pour chaque cible, il faut une sémantique spécifique et éviter les maladresses.

Parler aux autonomes : informatif, participatif, valorisant

  • Privilégier les messages qui invitent et valorisent, même sur les aspects pratiques.
  • Formuler des propositions participatives (“Vous souhaitez rejoindre l’atelier?”, “Proposez-nous vos idées!”)
  • Fournir du contexte, des détails : informations sur les animations, menus, comptes-rendus, actualités nationales ou locales, informations santé approfondies.
  • Utiliser un ton dynamique, inclusif, sans jargon médical, ni condescendance.

Parler aux dépendants : rassurant, simple, direct

  • Privilégier un langage court, phrases simples, vocabulaire courant.
  • Mettre l’accent sur la sécurité, la routine, la confiance (“Nous allons vous accompagner aujourd’hui pour…”)
  • Répéter les messages-clés. La mémoire est parfois altérée : la répétition rassure, sécurise.
  • Éviter surinformation, détails inutiles ou trop de choix.

Un exemple concret : annoncer une animation.

  • Pour les autonomes : “Cet après-midi, atelier yoga à 16h en salle commune. Animé par Anna. Inscriptions à l’accueil, places limitées. N’hésitez pas à proposer un thème pour la prochaine séance.”
  • Pour les dépendants : “Aujourd’hui, atelier yoga à 16h. On viendra vous chercher. L’animatrice s’appelle Anna.”

Impliquer l’écosystème : la place des familles et des équipes

Plus un résident est dépendant, plus les proches et les professionnels jouent un rôle d’ambassadeurs du message.

  • Informer la famille en amont : email, courrier, SMS. Les familles sont souvent relais d’information et d’explication (France Alzheimer).
  • Former l’équipe : l’aidant ou le soignant doit comprendre la consigne pour la transmettre sans la dénaturer.
  • Créer des supports personnalisés : livret d’accueil adapté au niveau de dépendance, guide simplifié accompagné pour les aidants naturels.

Ce travail de relais est aussi un gage de confiance : 70% des familles souhaitent être associées à la vie de l’établissement (Enquête Cap Retraite, 2022).

Typologie de contenus et supports différenciés

Profil Supports privilégiés Type de contenu Objectif
Autonomes Newsletter, affiches détaillées, conférences, site web Infos animations, actualités légales, bien-être, prévention santé, témoignages, retours d’expérience Impliquer, fidéliser, proposer, solliciter un avis, valoriser l’autodétermination
Dépendants Affiches pictogrammes, messages oraux, livrets simplifiés Informations du quotidien, consignes, rappels sécurité, photos, communication non verbale Rassurer, répéter, impliquer l’entourage, limiter l’attente, donner du sens immédiat

Erreurs à éviter et points de vigilance

  • Infantiliser (même involontairement). L’infantilisation est la première critique remontée par les usagers autonomes (source : Baromètre France Silver Eco 2023). Évitez les formules “comme les enfants…”, le tutoiement systématique ou la surprotection verbale.
  • Multiplifier les informations pour les résidents dépendants. Un seul message, plusieurs canaux, mais pas de surcharge : chaque idée doit être isolée au maximum.
  • Uniformiser la signalétique. Un fléchage complexe ou trop stylisé trouble la compréhension. Privilégier des pictogrammes simples, contrastés, testés auprès du public cible.
  • Oublier la temporalité. Les résidents dépendants profitent d’un rythme plus lent : laissez du temps à la compréhension et à l’adaptation.

Anticiper l’évolution des profils et rester agile

L’état d’un résident évolue : ce qui fonctionne pour lui aujourd’hui ne sera peut-être plus pertinent demain. Les établissements doivent régulièrement réévaluer leurs dispositifs. Un exemple : en 2022, 12 % des résidents en résidences services seniors sont passés en GIR 4 ou 3 en moins de 18 mois (INSEE, 2023).

Conseils pratiques pour rester agile :

  • Analyser les retours (familles, résidents, équipes)
  • Tester de nouveaux supports chaque trimestre
  • Former les équipes à la communication adaptée
  • Impliquer les résidents dans la conception des messages et supports

Pour une communication qui fédère et valorise la relation

Adapter la communication à l’autonomie véritable d’un résident, c’est faire un pas de plus vers une vie collective respectueuse, motivante et réconfortante. L’efficacité de l’information, la qualité du lien social, le bien-être ressenti par l’usager et son entourage dépendent en grande partie de cette personnalisation. Investir dans une démarche différenciée, c’est renforcer l’image, l’attractivité et la notoriété durable de son établissement. Un sujet à intégrer dès maintenant à chaque projet de communication senior, quelle que soit l’envergure… et à réinterroger sans cesse, car les besoins évoluent vite !

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